IMPASSE DE L'OCÉAN ; Hubert Haddad
Après avoir reçu le prix Louis Guilloux 2013 pour son roman Le Peintre d'Éventail, Hubert Haddad est actuellement présent au festival "Étonnants Voyageurs" de Saint Malo ; ce même roman est en lice pour le prix Ouest-France Étonnants Voyageurs.
J'ai retrouvé un texte inédit d'Hubert Haddad. Il date de 1995 et il me fait plaisir de le partager.
Impasse de l'océan
1.
La terre attend miséricorde
Un couteau sombre au fond
du corps
j'ausculte la nuit
2.
Dans l'instant l'absolu
Vivre enfin
sans obsession millénaire
3.
Mille ans, cent mille ?
Ténèbres où nulle ne m'aborde
L'enfance a passé le pas d'étermité
Tout est envol
Nous ne sommes pas
4.
J'ignore mon mystère et vos pouvoirs
Notre rencontre ne peut être qu'abandon
de l'un au même
jusqu'à l'oubli lumineux
5.
Paupières cousues des morts :
le sang s'est enfoncé derrière les os
Pâleur comme une émotion
absolument rentrée
6.
L'aventure de la poussière
n'intéresse pas la montagne
(quand l'enfant des marécages
ciel fou en tête
ouvre une fenêtre dans sa poitrine)
À l'heure des seins nus
le génie veille
7.
La nuit égale la nuit
Tout chemin est solitaire
et l'Égarée ignore son guide
Ne songe plus au triste palais d'Euclide
Cours vers les marécages
palatiaux !
8.
Bruit des rochers immenses
dans ce silence de songe
Il neige un duvet d'ange
Un dieu s'ébroue parmi sa garde-robe
L'enfant à la valise transporte son corps
à la morge d'Idumée
9.
Dante ou pas dans tes pas
L'éternité agie
Comme l'ange des mémoires chues
Au visage assagi
Le temps ou pas
La vie si haut tenue
10.
Le monde est ma déchirure
Il faut aimer à en perdre la vie
lutter sans détruire un seul jour
changer la mort en espérance
Comme un combat le licornes
sur la place des fusillés
11.
Le temps est ce cristal posé
entre vous et moi
lointaine à ma semblance
Nous nous reverrons dans le plus bel ici