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Littér'auteurs
31 juillet 2013

MÊME PAS MORT À VIENNE, Patrice Maltaverne

« La revue "ficelle" ne publie que ce qui lui plaît et ça ne risque pas de changer ». Et Vincent Rougier a très certainement bien raison d’affirmer haut et fort sa politique éditoriale et de n’en changer aucun iota. Abonnée depuis plus d’un an à cet opuscule original (Parution bimestrielle. 10x15 cm, in quarto, 32 à 40 pages, textes et dessins originaux. Brochée couture plate. Présentée en enveloppe postale agrémentée d'un timbre d'artiste. Tirage : 250 à 500 exemplaires), je reçois avec plaisir chaque dernier numéro, dont je coupe avec application chaque page, dont je lis chaque auteur avec conviction.

Maltaverne même pas mort à Vienne

Il vient de me parvenir le n° 114, écrit par Patrice Maltaverne.

« Même pas mort à Vienne », titre-t-il.

Il ne me faut pas dramatiser, je ne suis quand même pas morte en lisant ce texte, mais je me suis ennuyée à mourir. Comment dirais-je ? Un « non-guide » de Vienne. Excusez mon indigence et mon inculture, cher auteur, cher éditeur… je n’ai pas compris, pas pas pas… nada ! C’est pas poétique, c’est pas fantaisiste, c’est même pas drôle. Même que je ne suis quand même pas même pas morte ! Alors, je ne vais  pas trop me plaindre.

J’aime que Vincent Rougier, depuis 1995, « tisse patiemment une toile éditoriale digne d’éloges, indifférent aux courants successifs qui agitent le petit monde de la poésie, qu’il  édifie une nouvelle forme d’édition située à des années-lumière des entreprises qu’il exècre ». Mais, en l’occurrence, c’est moi qui, ce mois, suis à des années-lumière de ce qu’il a choisi de publier.

Je trouve – mais ça n’est que mon humble avis – que c’est de l’imposture…. À moins que – et c’est tout à fait possible – je sois complètement hermétique à ce genre de prose (ou de "poésie du voyage").

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30 juillet 2013

YVON KADER, DES OREILLES À LA LUNE, Jean-Pierre Cannet

Yvon Kader JP Cannet

Yvon, c'est sa maman bretonne qui a choisi le prénom. Kader, c'est son papa algérien. Yvon Kader vient au monde. Il aurait pu être un harmonieux représentant de la mixité planétaire. Seulement voilà, la lune, la pleine, la belle, qui veillait à sa naissance a eu comme un coup de mou. Et le nouveau-né a bu la lune. Yvon Kader vient de la lune.

La sage-femme dit : "Il est comme il est, il vivra !
Yvon Kader dit : "C'est mieux quand le nourrisson n'est pas mort, ça lui donne des chances supplémentaires pour l'avenir".

Yvon Kader fait ainsi connaissance avec la trisomie. Ses parents aussi.

Yvon Kader dit : "C'est difficile pour mes parents, je me mets à leur place".
Les parents disent : "C'est la faute à la faute".

Quand le Père Noël demande à Yvon Kader ce qu'il a commandé,..
Yvon Kader dit : "Ma vie".

Quand Yvon Kader rencontre La Pette, sur les escalators de la galerie marchande...
La Petite dit : "Tu n'es pas normal, toi ! [...] Demande à ton miroir".

Alors, Yvon Kader, quand il se retrouve avec ses parents...
Yvon Kader dit : "Maman [...] tu ne veux pas corriger ton brouillon ? Je le sais que la vie est salissante...".

Yvon Kader a une "tête de lune rousse". et se souvient de son "alunissage sur le toit du monde de ses parents".

YVON KADER, DES OREILLES À LA LUNE, est une pièce de théâtre, écrite par Jean-Pierre Cannet. Non, ce n'est pas un texte "sur" la trisomie. C'est un texte de vie, qui que soit celui qui la vit. En l'occurence, c'est Yvon Kader, trisomque, qui la vit.

J'ai découvert ce texte, dimanche, au festival Textes en l'air, à Saint Antoine l'Abbaye, en Isère. C'était une lecture. J'ai découvert. J'ai été touchée. pas bouleversée, non. Touchée. Par les mots qui se disent.
J'ai acheté le livre. Touchée par les mots qui se lisent.

Alors, je partage ce délicieux moment. Il est publié à l'école des loisirs. Il est accessible à tous, enfants et adultes. 

29 juillet 2013

LE BAL - Irène Némirovski

Le bal nemirovski

Dans la famille Kampf, je voudrais le Père. Un petit homme falot, Un Juif allemand qui peinait à la Banque de Paris,comme chasseur d'abord, puis comme employé, dans les années 1920. Il avait dévergondé la dactylo du patron en lui promettant monts et merveilles, et surtout l'opulence.

Dans la famille Kampf, je voudrais la Mère. Rosine, ladite dactylo. Un vrai personnage de roman-feuilleton. La petite fille pauvre qui rêve de devenir riche. C'est d'ailleurs dans les magazines à quatre sous qu'elle puise son inspiration et ses aspirations.

Dans la famille Kampf, je voudrais la Fille. Antoinette, quatorze ans, plate comme une presque limande, au physique ingrat. Mais bourgeonnante d'adolescence naissante.

Ce roman/nouvelle est un quasi huis-clos de deux semaines entre ces trois protagonistes. 

Monsieur Père, s'est un jour pris pour un trader de génie. Banco ! il a fait fortune ! Foin de la rue Favart ! Foin des chaussettes à ravauder ! Foin des devoirs faits sur la table de la salle à manger ! Désormais, au jeu des sept familles, les Kampf brillent de mille feux. Enfin, ils essaient. Et, pour essayer de jouer dans la même cour que les "Ôtres", madame mère et monsieur père vont organiser un bal.

Une telle entreprise, faut pas dire, demande une belle organisation, et un réseau d'approximatives connaissances, qui deviendront, si l'on si prend correctement, des "chèèèèères" connaissances. Nous sommes dans les Années Folles, rappelons-le. On est dans le paraître, dans le futile. Rosine excelle dans l'art de l'inconsistant. On invite à tour de bras, des vrais barons, des fausses comtesses, des incontestables gigolos, des anciennes catins...

Et pendant ce temps, Antoinette rêve. De devenir grande. De découvrir l'amour. De trouver le plaisir. Quand elle apprend que Maman s'oppose à ce qu'elle assiste au bal, Antoinette s'effondre, se révolte, puis se venge. De sa mère, de sa gouvernante aussi qui a le bonheur de connaître les batifolages de l'amour.

C'est ainsi qu'Antoinette va créer les conditions pour changer de statut, involontairement, dans un geste de dépit. Un geste qui aura pour conséquence de renverser les relations entre la mère et la fille.

Publié en 1930, par une romancière russe qui mourra dans les camps d'Auschwitz, ce texte est à la fois une satire caustique de la société faussement bourgeoise, une fine analyse des relations mère/fille, un regard affûté sur cette partie de la vie qu'on nomme adolescence, pleine de contradictions, de haine et d'amour mélangés....

Une savoureuse lecture d'été, rafraîchissante à souhait, quoi qu'abondamment aromatisée à l'acidité du citron....

 

 

Les avis de Soukee, de Choco...

28 juillet 2013

LA POÉSIE DANS LE BOUDOIR : Maram al-Masri

Signe 15

Joueuse
je m'entête à jouer au hasard
je joue avec les mêmes lettres
et à chaque fois je me mets moi-même
en gage

sans tricherie
je mets en jeu des matières vivantes

obstinée
je m'accroche à la poésie

comment puis-je la saisir sans la faire mienne
comment voir ses signes
sans me prosterner
devant cette légère
                        soudaine
                                           difficile

                                                         belle ?

Maram al-Masri, Par la fontaine de ma bouche, Éditions Bruno Doucey

25 juillet 2013

L'ENFANT CACHÉE - Loïc Dauvillier, Marc Lizano, Greg Salsedo

 

Voici trois semaines, je présentais "La petite famille". Émotion, tendresse, pudeur, générosité dans les mots et le graphisme de cet album. Un coup de coeur, vrai et sincère... Une envie de partager avec mes petits-enfants... 
Un commentaire discret de Loïc Dauvillier, pour me remercier (et pourtant, c'est moi qui le remercie !). Un échange/courriel : il me suggère "L'enfant cachée"... (du même auteur)
Bien sûr, je ne résiste pas au désir/besoin de découvrir ce titre !

l'enfant cachée

L'enfant cachée.

Une fillette qui s'aperçoit que sa grand-mère ne trouve pas le sommeil. Qui quête la parole de cette douce Mamie qu'elle aime. .
"Tu sais, quand moi je fais un cauchemar, je le raconte à Maman, et après ça va beaucoup mieux".

Le cauchemar de Mamie, voilà bien longtemps qu'il l'habite, qu'il la hante, qu'il la poursuit, qu'il la tourmente. "C'était il y a très longtemps. Mamie était encore une petite fille".

Mamie se prénomme Dounia. Elle était une petite fille quand la guerre semblait avoir cessé. Et sa victoire c'était d'avoir retrouvé son Papa vivant. Un jour funeste, pourtant, Dounia devra arborer l'étoile jaune...

L'atmosphère. Le cadre. Un sujet mille et une fois traité. Avec plus ou moins de justesse, de sensibilité, de bon goût, C'est selon. Un sujet délicat, un peu risqué quand l'on prétend, de surcroît, s'adresser à des enfants.

Un sujet complètement maîtrisé dans cet album. Pas de pathos, ni d'amphigouri. C'est clair, limpide, sans équivoque. Ça parle tout droit au coeur, à l'intelligence, au sens. Ça parle des rafles juives, du Vel d'Hiv, de la séparation, de la mort, des camps... des choses graves, dramatiques, inexcusables, tragiques de l'histoire des hommes. Et ça parle de cela avec tant de pudicité, de retenue, mais aussi tant de vérité, d'authenticité ! 

l'enfant cachée

L'image qui m'a le plus frappée, émue, touchée... la voici. Cette Maman qui s'en revient des camps... squelettique. Elle a conservé sa "figure" maternelle. Mais son corps est décharné : "Je ne savais pas comment faire. J'étais horrifiée. [...] Au début je ne l'ai pas reconnue. [...] Il m'a fallu un moment avant d'être certaine que c'était bien ma maman". 

C'est le fils de Dounia qui conclut, le papa de la fillette. Il s'adresse à Dounia, sa mère : "Je voulais simplement te dire que je suis très heureux et très fier que ce soit toi qui lui aies raconté".

Merci à Marc Lizano, à Loïc Dauvillier et à Greg Salsedo de m'avoir donné à rencontrer Dounia, son histoire et sa petite-frille.

 

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14 juillet 2013

LA POÉSIE DANS LE BOUDOIR : Léo Ferré

Miss-tic-Léo-ferré-Résidence-universitaire-orly

Le poète est parti, il y a 20 ans aujourd'hui. Mourir un 14 juillet... le comble pour celui qui se revendiquait anarchiste ! Léo Ferré c'était bien plus que cette "grande gueule" à vif ; c'était un homme de mots, de notes, de gestes, de tendresses, de flammes, de colères. D'outrances, certes, qui irritaient bon nombre de ses contemporains. D'engagements, aussi, qui séduisaient les indignés de sa génération.C'était un grandiloquent timide, un bavard silencieux. 

Léo n'était pas non plus que le chanteur qui interprétait les superbes prosodies que ses émotions lui inspiraient. Léo, c'était aussi un pianiste qui a dirigé avec brio et générosité plusieurs orchestres symphoniques. Léo, c'était aussi celui qui mettait en musique Apollinaire, Aragon, Verlaine, Beaudelaire, Angiolieri, Rutebeuf, Villon, Caussimon, Lautréamont, Rimbaud. Léo, c'était encore un génial touche à tout, qui s'est essayé à la composition d'un opéra, d'un oratorio, d'un ballet, d'une musique de film.

Ferré, c'était même un écrivain : récit d'enfance, littérature épistolaire, essai, portrait, théâtre.

Miss Tic lui a ici rendu hommage en réalisant deux fresques sur les murs de la résidence d’étudiants Léo-Ferré, à Orly.

Léo Ferré, c'était...

La solitude

 

léo ferré 2

Je suis d´un autre pays que le vôtre, d´une autre quartier, d´une autre solitude.
Je m´invente aujourd´hui des chemins de traverse. Je ne suis plus de chez vous.
J´attends des mutants.

Biologiquement, je m´arrange avec l´idée que je me fais de la biologie : je pisse,
j´éjacule, je pleure.

Il est de toute première instance que nous façonnions nos idées comme s´il s´agissait d´objets manufacturés.
Je suis prêt à vous procurer les moules. Mais...
La solitude...
La solitude...

Les moules sont d´une texture nouvelle, je vous avertis. Ils ont été coulés demain matin.
Si vous n´avez pas, dès ce jour, le sentiment relatif de votre durée, il est inutile de vous transmettre, il est inutile de regarder devant vous car devant c´est derrière, la nuit c´est le jour. Et...
La solitude...
La solitude...
La solitude...

Il est de toute première instance que les laveries automatiques, au coin des rues, soient aussi imperturbables que les feux d´arrêt ou de voie libre.
Les flics du détersif vous indiqueront la case où il vous sera loisible de laver ce que vous croyez être votre conscience et qui n´est qu´une dépendance de l´ordinateur neurophile qui vous sert de cerveau. Et pourtant...
La solitude...
La solitude!

Le désespoir est une forme supérieure de la critique. Pour le moment, nous l´appellerons "bonheur", les mots que vous employez n´étant plus "les mots" mais une sorte de conduit à travers lequel les analphabètes se font bonne conscience. Mais...
La solitude...
La solitude...
La solitude, la solitude, la solitude...
La solitude!

Le Code Civil, nous en parlerons plus tard. Pour le moment, je voudrais codifier l´incodifiable. Je voudrais mesurer vos danaïdes démocraties. Je voudrais m´insérer dans le vide absolu et devenir le non-dit, le non-avenu, le non-vierge par manque de lucidité.
La lucidité se tient dans mon froc!
Dans mon froc!

 

Léo Ferré, c'était...

 

léo ferré 1

Je t'aime tant

Mon sombre amour d'orange amère
Ma chanson d'écluse et de vent
Mon quartier d'ombre où vient rêvant
Mourir la mer
Mon beau mois d'août dont le ciel pleut
Des étoiles sur les monts calmes
Ma songerie aux murs de palme
Où l'air est bleu
Mes bras d'or mes faibles merveilles
Renaissent ma soif et ma faim
Collier collier des soirs sans fin
Où le coeur veille
Est-ce que qu'on sait ce que se passe
C'est peut-être bien ce tantôt
Que l'on jettera le manteau
Dessus ma face
Coupez ma gorge et les pivoines
Vite apportez mon vin mon sang
Pour lui plaire comme en passant
Font les avoines
Il me reste si peu de temps
Pour aller au bout de moi-même
Et pour crier Dieu que je t'aime
Je t'aime tant, je t'aime tant
Léo Ferré, c'était ...
Il n'aurait fallu

léo ferré 3

Il n'aurait fallu
Qu'un moment de plus
Pour que la mort vienne
Mais une main nue
Alors est venue
Qui a pris la mienne
Qui donc a rendu
Leurs couleurs perdues
Aux jours aux semaines
Sa réalité
A l'immense été
Des choses humaines
Moi qui frémissais
Toujours je ne sais
De quelle colère
Deux bras ont suffi
Pour faire à ma vie
Un grand collier d'air
Rien qu'un mouvement
Ce geste en dormant
Léger qui me frôle
Un souffle posé
Moins une rosée
Contre mon épaule
Un front qui s'appuie
A moi dans la nuit
Deux grands yeux ouverts
Et tout m'a semblé
Comme un champ de blé
Dans cet univers
Un tendre jardin
Dans l'herbe où soudain
La verveine pousse
Et mon coeur défunt
Renaît au parfum 
Qui fait l'ombre douce
Il n'aurait fallu
Qu'un moment de plus
Pour que la mort vienne
Mais une main nue
Alors est venue
Qui a pris la mienne



 

11 juillet 2013

LES DERNIÈRES NOTES DE THOMAS F, Kjell Askildsen

Je ne me sens pas très compétente pour chroniquer un recueil de nouvelles, je n'ai découvert cette écriture qu'en décembre dernier. Je disposais d'une excellente ambassadrice et, toutes deux, elle devant, nous avons écumé la libraire de l'Université à Grenoble, un 24 31 décembre 2012. Elle flirtait avec les livres, les tables de présentation, me donnait une piste, puis me disait "attends, il y a mieux". Je notais... impossible de tout écrire; je prenais... impossible de tout acheter; j'écoutais... impossible de tout entendre. Depuis... oui ! je lis des nouvelles !

Avec plus ou moins de plaisir, plus ou moins d'intérêt. Il faut dire que la barre était haute : Raymond Carver. Et qu'après avoir découvert l'un dee génies de ce genre littéraire, il m'a semblé bien difficie de trouver son équivalent, son homologue.

Et j'ai lu, il y a peu "Pour l'Amour du Chocolat", écrit par José Carlos Carmona. Sous le charme, j'ai eu envie de mieux connaître cet écrivain. Il dit que ses maîtres à écrire sont... précisément Raymond Carver et.... Kjell Askildsen.
Curiosité, quand tu me tiens ! Va pour découvrir Kjell Askildsen !

Un vrai bonheur. C'est de la pépite à l'état pur.

les dernières notes de thomas f - Askildsen

Le titre éponyme de ce recueil donne le ton d'une succession narrative qui tire du quotidien ordinaire, sans charme particulier, la force de l'équivoque.Les Dernières Notes de Thomas F. est une sorte de journal intime d'un vieillard qui jette sur son entourage un regard sans aménité. Se succèdent ensuite huit personnages, modestes et insignifiants à souhait, dont la vie monotone va être transcendée par la plume affûtée de Kjell Askildsen. C'est la futilité - la broutille - qui sert d'argument au développement de chaque nouvelle : un ancien médecin reclus dans une cave qui retrouve le magistrat qui l'avait autrefois condamné, un homme injustement soupçonné de viol qui s'englue maladroitement dans la démonstration de son innocence, un mari qui ne supporte pas que sa femme trouve un emploi.... Bref, concis, l'auteur brosse des instantanés peu flatteurs de la vie ordinaire, développe l'évènement sans intérêt pour lui donner force et dénouement inattendu.

De la belle ouvrage ! Askildsen montre avec art comment les relations entre les gens simples sont sources de dysfonctionnement, met l'anodin en relief. C'est du talent !

Kjell Askildsen

Kjell Askildsen est un écrivain norvégien, né en 1929. Son premier roman, écrit en 1953 a soulevé la controverse et a été interdit dans son pays. Les Dernières Notes de Thomas F datent de 1983. Le recuei a été couronné du Norwegian Prix de la Critique de littérature, ce qui me permet d'inscrire cet excellent ouvrage dans le challenge "À tous prix" de  Laure.

 

Challenge a tout prix

 

8 juillet 2013

LA PETITE FAMILLE, Loïc Dauvillier, Marc Lizano, Jean-Jacques Rouger

Lorsqu'en avril dernier Jérôme a présenté cet album, j'ai tout de suite pensé à l'un de mes bambins de presque 8 ans qui dit adorer ses vacances chez les grands-parents, qu'ils soient Pépé/Mémé, Papy/Momée, ou Mamie/Bernard. (Eh oui ! il a trois familles grand-parentales, le bambin !). Mais c'est qu'on ne trouve pas cet album sous le sabot d'un cheval (tiens, c'est vrai ! c'est pour faire de l'équitation que le-dit bambin passe ses vacances chez Papy/Momée) et j'ai du attendre de longues semaines pour recevoir le livre. Eh bien, je ne regrette pas.

La petite famille 1


Deux marmousets espiègles arrivent tout feu tout flamme chez Pépé/Mémé qui vivent à la campagne. Mémé-gateau et Pépé-ronchon les attendent impatiemment. Enfin... Mémé est quand même un peu plus expansive que son grognon d'époux et c'est, au fil des pages, que le lecteur comprend comment les relations petits-enfants/grands-parents se construisent, se nouent. Bref, comment on s'aime en famille.

Personne n'est idéalisé dans cet album ; les gamins sont farceurs juste comme il se doit, les parents ne sont pas drôles du tout quand ils veulent faire étalage de leurs attitudes de "bons parents" (dans le genre :'Tiens-toi bien", "Tu as entendu ce que t'a dit Maman ?", si vous voyez ce que je veux dire), Le tonton complice des petites bêtises que les adultes rendent grosses. Une Mémé "tout comme il faut", protectrice à souhait,  un peu trop d'ailleurs. Un Pépé drapé dans son rôle de patriarche et qui montre, pourtant, ses petites faiblesses : allez donc découvrir ce qu'il fait pendant que Mémé et les deux petiots font le marché !

Pépé, c'est quand même un personnage énigmatiqe. Les gosses, leur grand-père, ils trouvent qu'il "n'est pas méchant du tout, qu'il est tout doux, même qu'il a la peau râpeuse". Ils lui connaissent quelques passions, la pêche, par exemple. Mais QUI est Pépé ? 

Ces gens-là sont aussi vrais que nature, pas de bla-bla inutiles. On est en plein dans nos souvenirs d'enfance (moi, j'adorais croquer des petites carottes que mon Papy sortait de terre tout exprès pour moi, alors qu'il m'avait enroulée - en plein mois de juillet - dans son écharpe tricotée main qui m'enveloppait complètement). On est en plein projet de grands-parents, quand on reçoit les mioches que nous ont offert nos enfants.

Oui, mais un Pépé, une Mémé... c'est qui, en vrai ? Et quand le marmouset narrateur découvre et reconnaît le grand-père qu'il n'imaginait même pas jeune, beau et vaillant... quelle belle surprise !

Las ! La vie est ainsi faite qu'à peine on se rencontre vraiment, on doit se quitter. 

Le départ de Pépé est traité avec pudeur, humanité, sans trop, ni pas assez. L'enfant questionne sa responsabilité dans ce départ, sa culpabilité peut-être. C'est ainsi qu'il grandit et découvre ce qu'aimer veut dire.

Un grand bravo aux auteurs/illustrateurs et aux Éditions de la Gouttière. Cet album, c'est cadeau, c'est trésor.

 

Noukette et Choco ont aussi aimé cette BD et l'ont chroniquée.

 

7 juillet 2013

LA POÉSIE DANS LE BOUDOIR : Anne Bihan

enfant travail

 

Premier dimanche de vacances pour beaucoup d'enfants. Mais je dédie ce poème à tous les enfants qui ne peuvent pas se dire "en vacances", parce qu'ils n'ont pas accès à l'éducation, à l'enseignement,  à l'école.

Enfances pas

Enfances pas
facile pour un printemps
trop d'évidences.

Commence à l'envers !           Automne.
Tic-tac, tic-tac, le réveil seul effraie la ténèbre où terreur que tout
soit murs,
anges, cailloux, frère corps d'oiseau, sous la terre boîte à chaussures.
Vers la boule du pied de lit premier geste du matin
casquette.
Retour des fenêtres.
Ah, vous dirais-je grand-père la figure de mes tourments ?

Cric-crac, pluie drue contre ardoises dans la baraque, ciel gronde
et roule, vitesse-lumière fracas mur du son
noir.
Monte et danse la flamme d'huile, balançoire des murs.
Au creux du miroir de l'évier piqué un visage fait
sécession          moi/je ? Hiver je te plumerai
et les yeux et la langue.

Endimanchées ding ding dong les hirondelles, du grenier vu !
La fenêtre est dans le toit ; empreinte du front contre, dehors,
la clarté. Descends jouer ! Attends, un navire glisse sur les prés,
la Loire hors
de son lit tan-tandis vous m'en direz tat que le muguet
musarde et papa aime maman. Dis-donc veux-tu
sept fois bien entre tes dents          V'là l'printemps gnan gnan !
chantourner ta langue ?

Am stram tout chaud les escargots s'enjambent où         l'été.
Mouche verte au bout d'un fil, deux grenouilles sur une échelle,
soudain la pluie ! Sept chatons sous une pelle, petite fille àla
margelle du puits.
Grand-mère, grand-mère des ritournelles d'un coup dépiaute
les lapins, trou dans la tête du malicoin. Sur l'pont de Nantes
didi cècikikicè          noyés ?

Fin de la ronde des saisons, le miroir tend l'autre visage,
les eaux font le reste. Dernier bouquet,
dahlias glaïeuls et gypsophiles, papier journal
et vieilles mains.          Partir là où
hisse et ho flamboyants frangipaniers hibiscus
bougainvillées. Mais la nuit emmure toujours, loup es-tu ?
Ah qu'elle est jolie la petite chèvre....

Cette enfance encore oh !
pourvu qu'elle tienne jusqu'à
la morsure de l'aube.

Anne Bihan, poème inédit in Enfances, Regards de poètes, Éditions Bruno Doucey

 

POÉTISONS


Le jeu

Et vous ? Quels poètes vous inspirent l'enfance ? Poétisons ensemble...

La règle du jeu est ici.

Plus nous serons nombreux à faire parler la poésie, plus elle restera vive, créatrice et porteuse de beauté et de vérité..

Dimanche dernier, Laurence a poétisé avec moi.

À vous les mots !

 

1 juillet 2013

POUR l'AMOUR DU CHOCOLAT, José Carlos Carmona

 

Pour l'amour du chocolat

À l’origine, José Carlos Carmona avait intitulé son ouvrage « Una sinfonía concertante ». Peut-être ce titre aurait-il attiré moins de lecteurs que ceux qui ont été appâtés par sa modification éditoriale espagnole « Sabor a chocolate » et sa traduction française « Pour l’amour du chocolat ». L’alliance trompeuse, à mon avis, des mots [amour & chocolat] assigne une représentation complètement fausse à ce court, très court et excellent roman. Car ni l’amour, ni le chocolat, qui servent certes de base au déroulement de l’intrigue n’y ont place prédominante.

José Carlos Carmona est un musicien, un chef d’orchestre. Il est professeur au Conservatoire de Musique de Malaga. Et sa caractéristique principale est la pluralité accomplie de son travail qui se déploie dans la musique classique, la littérature, la philosophie, les arts scéniques, la politique contemporaine.
Ce roman, il l’a conçu comme une symphonie, en lui donnant la structure d’une œuvre musicale, en trois mouvements, allegro, adagio et presto final. Les chapitres sont très courts, les phrases directes et incisives. Le lecteur peut, au gré de son imagination, reconstruire tout ce qui « manque ». L’auteur, ici, est une sorte de sculpteur littéraire qui définirait une forme narrative particulière et laisserait place aux vaticinations diverses.

Une technique qui émet une « musique » épurée. Une syntaxe qui permet de visiter presque un siècle, de 1922 à 2001. Une structure rapide, segmentée, pleine d’évènements inattendus, ponctués, en contrepoint, par certaines tragédies historiques qui font apprécier l’atmosphère de cette époque. José Carlos Carmona pose son estrade en Suisse, peut-être parce qu’elle est restée neutre pendant les guerres et qu’elle représente sans doute un lieu adéquat pour voir ce qui se passe autour. Peut-être aussi pour le chocolat ? Peut-être... Certains de ses personnages s’y installent, d’autres ne sont que de passage. Ils vont, viennent, aiment, souffrent, vivent, meurent en cent chapitres développés de quelques lignes seulement à deux pages maximum. C’est lapidaire, compact, ramassé. Ce peut être parfois facétieux (juste un peu), c’est très souvent émouvant. Le temps passe, fuit, et le lecteur, au diapason, suit la partition qu’un écrivain-musicien conduit avec maestria.

Mon billet, je l’espère, est explicite : j’ai aimé. Plus que l’intrigue en elle-même, j’aimé le procédé narratif. José Carlos Carmona confie au journal El Pais qu’il s’est essayé à une forme d’écriture particulière ; celle d’écrivains qu’il admire : John Doe (pseudo de Régis Messac ?), Alessandro Barrico (Soie), Pascal Quignard, (Tous les matins du monde), Handkel (L’après-midi d’un écrivain), Askildsen (Dernières notes pour Thomas F.)  …

Challenge a tout prix


Ce roman a très opportunément obtenu le Prix Littéraire de l'Université de Séville. Je vais donc proposer ce titre à Laure, qui a ouvert le "Challenge À Tous Prix", pour une 5ème participation.

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